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<u>LE JOURNAL DU JURA</u> (Bienne, Switzerland) 06 May 06 Charmant petit monstre - Triton à 5 pattes dans l'étang du Châtelet (Blaise Droz)
Tavannes: Les scientifiques l'appellent Triturus helveticus parce qu'il a été décrit en Suisse, sur les hauts de Lausanne, en 1789 par le naturaliste Razoumowsky. Ce petit triton brun-beige, discret, occupe l'Europe de l'Ouest et ne dépasse pas à l'est, une ligne approximative courant de Nice à Hambourg. En Suisse, il est absent du Valais du Tessin et des Grisons et se raréfie considérablement à l'est du pays.
Son nom ne figure pas dans les premiers rangs des listes rouges d'espèces menacées, mais comme tous les amphibiens, il subit les pressions exogènes liées aux activités humaines voire aux modifications climatiques.
Très souvent, il cohabite avec le triton alpestre et est généralement moins abondant que ce dernier.
A l'eau pour se reproduire
Comme beaucoup d'amphibiens, les tritons s'observent principalement lorsqu'ils sont dans l'eau ou au bord de celle-ci. Cependant, en dehors de la période printanière de reproduction, ils vivent dans l'humus, la mousse, sous les pierres, feuilles mortes ou tas de branchage.
Vendredi dernier, lorsque Tiffany Lehmann et Bastian Juillerat découvrirent un Triturus helveticus ou triton palmé, ils ne se doutaient pas de l'intérêt de leur trouvaille. Tiffany le pris dans sa main et le tendit au maître Martial Engel qui remarqua l'anomalie, somme toute discrète compte tenu de la faible taille de l'animal (6 cm de long). A partir du genou, la patte arrière droite se dédouble, ce triton a donc trois pieds. Si un chirurgien devait procéder à l'ablation du pied surnuméraire, il n'aurait en principe pas trop de peine à se décider. Le pied supérieur est un petit peu moins bien formé que l'inférieur. Ce serait donc lui le surnuméraire, encore qu'il ait pour lui l'avantage de se placer bien dans l'axe de la cuisse, contraignant l'autre ensemble - bas-jambe + pied - à former un coude marqué avec le fémur.
Cela étant, l'anomalie semble être tolérée sans mal par l'animal qui présente une vigueur tout à fait normale.
Il est intéressant de savoir que chez cette espèce, le mâle se transforme en période nuptiale. La queue se trouve alors prolongée par une fine aiguille fragile nommée éperon, dont la fonction est mystérieuse. Mais ce qui est particulièrement intéressant, c'est que les doigts des pattes arrière se trouvent reliés par des palmes membraneuses uniquement durant cette courte période. Or, le pied surnuméraire est correctement palmé, témoignant d'une irrigation sanguine, d'une innervation et d'une fonctionnalité quasiment normale de cet appendice soumis comme l'autre aux transformations saisonnières.
Dans la foulée de Jean Rostand, le zoologue français Alain Dubois du Muséum d'histoire naturelle de Paris fait référence en matière de monstruosités (anomalies morphologiques) chez les amphibiens. Il a étudié déjà plusieurs centaines de grenouilles, crapauds ou tritons polydactiles (à doigts surnuméraires) ou encombrés d'autres anomalies. En son absence, Jean Lescure, spécialisé, lui, dans les amphibiens sains ne désire pas marcher sur les plates-bandes de son collègue. Il indique cependant que des cas de monstruosités d'amphibiens ont été constatés au Canada dans des populations où une corrélation avait été établie avec le traitement intensif des cultures environnantes. Il a aussi été fait parfois mention de virus mais l'état des connaissances en la matière est lacunaire.
Chose intéressante, dans le même étang du Châtelet, une grenouille albinos de l'espèce Rana temporaria (grenouille rousse) avait été découverte par le soussigné en mars 1983. En ce temps-là, les grenouilles rousses étaient abondantes et de 500 à 700 femelles pondaient à l'étang chaque printemps. Ce nombre a nettement diminué depuis, sans que l'on sache pourquoi. Interrogé sur une possible corrélation entre la monstruosité d'un triton et l'albinisme d'une grenouille, Jean Lescure est catégorique. Contrairement à d'autres scientifiques qui ont cherché de ce côté, il est convaincu que l'albinisme et les anomalies pigmentaires de même type sont strictement héréditaires.
Quant à Kurt Grossenbacher du Musée d'histoire naturelle de Berne, qui fait autorité en matière d'amphibiens en Suisse, il se dit fort heureusement surpris de cette découverte et extrêmement intéressé. «Il faudrait pouvoir étudier sérieusement cet individu, car l'anomalie dont il est frappé est particulièrement rare.» Notons pour conclure que dans les années 60, une population de grenouilles polydactiles dans les étangs de Bonfol avait été longuement étudiée.
http://www.journaldujura.ch/front_article.cfm?id=182292&kap=bta
Tavannes: Les scientifiques l'appellent Triturus helveticus parce qu'il a été décrit en Suisse, sur les hauts de Lausanne, en 1789 par le naturaliste Razoumowsky. Ce petit triton brun-beige, discret, occupe l'Europe de l'Ouest et ne dépasse pas à l'est, une ligne approximative courant de Nice à Hambourg. En Suisse, il est absent du Valais du Tessin et des Grisons et se raréfie considérablement à l'est du pays.
Son nom ne figure pas dans les premiers rangs des listes rouges d'espèces menacées, mais comme tous les amphibiens, il subit les pressions exogènes liées aux activités humaines voire aux modifications climatiques.
Très souvent, il cohabite avec le triton alpestre et est généralement moins abondant que ce dernier.
A l'eau pour se reproduire
Comme beaucoup d'amphibiens, les tritons s'observent principalement lorsqu'ils sont dans l'eau ou au bord de celle-ci. Cependant, en dehors de la période printanière de reproduction, ils vivent dans l'humus, la mousse, sous les pierres, feuilles mortes ou tas de branchage.
Vendredi dernier, lorsque Tiffany Lehmann et Bastian Juillerat découvrirent un Triturus helveticus ou triton palmé, ils ne se doutaient pas de l'intérêt de leur trouvaille. Tiffany le pris dans sa main et le tendit au maître Martial Engel qui remarqua l'anomalie, somme toute discrète compte tenu de la faible taille de l'animal (6 cm de long). A partir du genou, la patte arrière droite se dédouble, ce triton a donc trois pieds. Si un chirurgien devait procéder à l'ablation du pied surnuméraire, il n'aurait en principe pas trop de peine à se décider. Le pied supérieur est un petit peu moins bien formé que l'inférieur. Ce serait donc lui le surnuméraire, encore qu'il ait pour lui l'avantage de se placer bien dans l'axe de la cuisse, contraignant l'autre ensemble - bas-jambe + pied - à former un coude marqué avec le fémur.
Cela étant, l'anomalie semble être tolérée sans mal par l'animal qui présente une vigueur tout à fait normale.
Il est intéressant de savoir que chez cette espèce, le mâle se transforme en période nuptiale. La queue se trouve alors prolongée par une fine aiguille fragile nommée éperon, dont la fonction est mystérieuse. Mais ce qui est particulièrement intéressant, c'est que les doigts des pattes arrière se trouvent reliés par des palmes membraneuses uniquement durant cette courte période. Or, le pied surnuméraire est correctement palmé, témoignant d'une irrigation sanguine, d'une innervation et d'une fonctionnalité quasiment normale de cet appendice soumis comme l'autre aux transformations saisonnières.
Dans la foulée de Jean Rostand, le zoologue français Alain Dubois du Muséum d'histoire naturelle de Paris fait référence en matière de monstruosités (anomalies morphologiques) chez les amphibiens. Il a étudié déjà plusieurs centaines de grenouilles, crapauds ou tritons polydactiles (à doigts surnuméraires) ou encombrés d'autres anomalies. En son absence, Jean Lescure, spécialisé, lui, dans les amphibiens sains ne désire pas marcher sur les plates-bandes de son collègue. Il indique cependant que des cas de monstruosités d'amphibiens ont été constatés au Canada dans des populations où une corrélation avait été établie avec le traitement intensif des cultures environnantes. Il a aussi été fait parfois mention de virus mais l'état des connaissances en la matière est lacunaire.
Chose intéressante, dans le même étang du Châtelet, une grenouille albinos de l'espèce Rana temporaria (grenouille rousse) avait été découverte par le soussigné en mars 1983. En ce temps-là, les grenouilles rousses étaient abondantes et de 500 à 700 femelles pondaient à l'étang chaque printemps. Ce nombre a nettement diminué depuis, sans que l'on sache pourquoi. Interrogé sur une possible corrélation entre la monstruosité d'un triton et l'albinisme d'une grenouille, Jean Lescure est catégorique. Contrairement à d'autres scientifiques qui ont cherché de ce côté, il est convaincu que l'albinisme et les anomalies pigmentaires de même type sont strictement héréditaires.
Quant à Kurt Grossenbacher du Musée d'histoire naturelle de Berne, qui fait autorité en matière d'amphibiens en Suisse, il se dit fort heureusement surpris de cette découverte et extrêmement intéressé. «Il faudrait pouvoir étudier sérieusement cet individu, car l'anomalie dont il est frappé est particulièrement rare.» Notons pour conclure que dans les années 60, une population de grenouilles polydactiles dans les étangs de Bonfol avait été longuement étudiée.
http://www.journaldujura.ch/front_article.cfm?id=182292&kap=bta